Villa Thuret centre de Recherche National Agronomique
Une balade au jardin botanique de la Villa Thuret est une façon de découvrir l’histoire du voyage des plantes dites de climat méditerranéen. Les plantes ont façonné la Terre. Elles ont inventé les moyens de conquérir tous les milieux. Depuis plus de 150 ans, le jardin Thuret rempli sa mission de jardin d’acclimatation des plantes du monde entier. Vous pouvez le visiter gratuitement.
Avec ses petits sentiers serpentant dans une végétation étonnante, laissée dans un état un peu de jungle sauvage, ce jardin au coeur de la ville d’Antibes Juan les Pins, mais peu fréquenté, vous fera passer un bien joli moment végétal. Les collections de la villa Thuret comprennent 2500 arbres et arbustes représentant 1600 espèces (répartis en 144 genres et 131 familles).
Gustave Thuret (1817-1875), algologue et botaniste, surtout connu pour ses travaux sur la reproduction des algues, est séduit par le climat et la nature sauvage du Cap d’Antibes. Il achète en 1857 un terrain de cinq hectares et crée un jardin botanique.
A cette époque, la Riviera est un lieu très prisé par la haute société, en particulier anglaise et russe. Les anglais, grands amateurs de plantes, créent autour de leurs villas de merveilleux jardins, en profitant des conditions climatiques privilégiées de cette région extraordinaire.
Les débuts du jardin sont difficiles car Gustave Thuret découvre les conditions climatiques irrégulières de la région et notamment la sécheresse estivale et les pluies torrentielles d’automne (comme quoi le réchauffement climatique n’y est pour rien sur les inondations actuelles).
Strelitzia reginae d’Afrique du sud
Il se heurte aussi à la difficulté de trouver les plantes qu'il recherche. Il s’appuie d’abord sur la relation scientifique et amicale qui le lie à Decaisne professeur au Muséum national d’Histoire naturelle de Paris et met en place un réseau de correspondants qui lui envoient des graines du monde entier. Il va être de plus en plus sollicité par des amateurs éclairés avec qui il entretient des relations fréquentes.
Il accueille les botanistes les plus éminents de son époque : Bentham, Hooker, Decaisne, Hanbury, Mastero, Schimper, Weddell, Burnat de Candolle, Planchon, Naudin, Duchartre, Engelmann et bien d’autres. Gustave Thuret, ami des Sciences et des Lettres reçoit aussi dans sa villa, diplomates, scientifiques et artistes.
George Sand évoque dans ses Lettres d’un voyageur (1868) : "…le plus beau jardin qu’elle ait vu de sa vie… ». Il poursuit l’acclimatation et l’étude des végétaux des zones subtropicales et méditerranéennes avec son ami Edouard Bornet (1828-1911) à qui l’on doit, entre autres, la première classification des lichens et la création de nombreux hybrides de cistes.
Ces travaux, initialement destinés à nourrir leur réflexion sur les modalités de transmission des caractères, a permis d’introduire de nouvelles espèces végétales sur le littoral méditerranéen et ont largement contribué à la transformation du paysage végétal de ce qui deviendra la mythique Côte d’Azur et à l’essor de l’horticulture méditerranéenne.
A la mort de Gustave Thuret, Edouard Bornet continue les travaux scientifiques qu’ils avaient entrepris ensemble et les publie. En 1877, madame Fould, épouse du frère aîné de GustaveThuret, fervente admiratrice du scientifique, achète la propriété au jeune frère de Gustave qui en a hérité et en fait donation à l’Etat français afin d’assurer la pérennité du jardin botanique et de poursuivre les recherches scientifiques.
Arbousier de Chypre
La direction de la villa Thuret est alors confiée en 1878 à Charles Naudin (1815-1899). Il poursuit l’œuvre de Thuret et de Bornet sur l’acclimatation d’espèces végétales exotiques et contribue à la découverte des fondements de la génétique. Il s’attache en particulier à l’introduction et à l’observation d’espèces encore rares d’Eucalyptus, de Pittospores ou de palmiers.
Georges Poirault (1858-1936), agronome, succède à Charles Naudin. Il enseigne également à l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles et en 1913, il se voit confier par le ministère de l’agriculture une mission de surveillance des épiphyties présentes sur la Côte d’Azur. Il installe entre 1923 et 1925 un premier arboretum d’essai en conditions naturelles, dans le massif de l’Estérel.
En 1927, la Villa Thuret est transférée du Ministère de l’Instruction Publique au Ministère de l’Agriculture, pour y devenir le Centre de Recherches Agronomiques. Dans cette nouvelle configuration, il va contribuer activement au développement de la recherche horticole méditerranéenne.
En 1946, l’Institut de Recherches Agronomiques devient l’Institut National de la Recherche Agronomique (Inra) et un centre de recherche est installé sur le Cap d'Antibes; les travaux portent alors sur les grandes cultures florales : l'oeillet, la rose, l'anémone, les techniques de culture hors sol puis la pathologie végétale et la lutte biologique.
L'Inra poursuit dans le jardin botanique les travaux d'acclimatation d'espèces végétales de climat méditerranéen. Botanistes et forestiers installent des arboretums d’élimination en différents sites, à partir des essais et des observations réalisées dans le jardin botanique.
Ces travaux contribuent à identifier des espèces végétales adaptées aux conditions environnementales locales et utilisables pour la reconstitution de la végétation dégradée par les incendies et l’urbanisation. Les résultats sont publiés en 1989.
en haut: Jubaea spectabilis, cocotiers du Chili
En janvier 2004, l’ensemble des laboratoires Inra qui étaient installés au cap d'Antibes sont transférés à Sophia Antipolis pour constituer avec l'Université et le CNRS, un nouvel ensemble intégré: le centre Inra AGROBIOTECH de Sophia Antipolis (plus grande technopole d’Europe).
Le port abri de l'Olivette
Au cap d’Antibes, seul le site de la villa Thuret, avec son jardin botanique, reste administré par l’Inra. Le jardin Thuret est le premier jardin pionnier qui sera à l’origine de tout les autres jardins de la cote Méditerranéenne. Son héritage est inégalable et sa biodiversité sur le climat méditerranéen est unique au monde.
Le climat méditerranéen est caractérisé par des précipitations limitées (entre 100 et 250 mm de précipitations par an) formant souvent de violents orages, des hivers doux et des étés chauds et secs (au minimum 25°C de moyenne); les vents soufflent souvent, et attisent des incendies d'origine naturelle qui surviennent en moyenne tous les 20 ou 30 ans.
Néanmoins ces conditions globales sont très variables sur une année et d'une année sur l’autre. Il existe 5 régions à climat méditerranéen, localisées sur les 5 continents, toujours le long d'une côte océanique ou maritime, entre 30° et 45° de latitude: il s'agit du bassin méditerranéen bien sûr et de sa Riviera, mais aussi de la Californie, de la zone centrale du Chili, de la pointe de l'Afrique du Sud et du sud de l’Australie.
Les vestiges semi-immergés de l'ancien port romain…
Ces 5 régions sont aussi appelées « hotspots de biodiversité », car les êtres vivants se sont adaptés à ces conditions si particulières et si variées et constituent une faune et une flore extraordinairement riches mais fragiles.
Etude des tortues de Meditérranée. Caretta, du nom scientifique de la tortue caouanne..
Le jardin Thuret, par sa situation géographique à l’extrême sud-est de la région méditerranéenne française, présente des analogies climatiques avec les autres régions méditerranéennes du monde. Parmi ses collections, de nombreuses espèces originaires de ces régions se sont donc « acclimatées » avec succès et en font un lieu d’une richesse extraordinaire.
DIAPORAMA THURET