Les jardins sont la signature de la ville de Menton. Depuis le XVIII° siècle, la cité est réputée pour la qualité de ses espaces botaniques. Elle est la ville où le citronnier pousse en pleine terre et la seule ville Française qui a une appellation d’origine contrôlé pour son citron.
Au XIXe siècle, à la faveur du microclimat mentonnais, des botanistes, notamment anglais, introduisirent des espèces tropicales et subtropicales et composèrent les harmonies végétales originales qui font aujourd’hui de Menton une serre à ciel ouvert unique en France.
Maria Serena, Val Rahmeh, Fontana Rosa, Serre de la Madone, sont autant de lieux oniriques où le paysage est roi, où plusieurs dizaines d’espèces de palmiers dominent des oliviers plusieurs fois centenaires, où les plantes de l’hémisphère sud côtoient les végétaux méditerranéens.
La préservation de cette spécificité passe par la création d’espaces contemporains au cœur de la ville, comme le Square des Etats-Unis et le Jardin du Campanin, auquel des grenadiers et des céramiques ornées de citrons confèrent un cachet typiquement méditerranéen.
Le sauvetage du jardin Serre de la Madone, la rénovation des Jardins des Colombières et de Fontana Rosa, l’enrichissement constant de la collection d’agrumes du Palais Carnolès sont des exemples concrets de la valorisation du patrimoine botanique exceptionnel du Pays Mentonnais.
La ville est classée « 4 fleurs », au premier rang des « Villes et villages fleuris » depuis plus de 20 ans. Depuis 1995, Menton est en outre lauréate du « Grand prix national du fleurissement » et détentrice de la fleur d’or, et consacrée par un titre de « meilleur jardinier de France ». Cette distinction exceptionnelle ne se fait que tous les sept ans à l’image du classement UNESCO.
Partons ensemble pour une visite de ces jardins remarquables, la, ou pousse l’oranger et le citronnier, la, ou murit banane et pamplemousse, la, ou le bougavillier et la rose resplendit.
Alors que l’Europe rêve de ces terres de soleil et de sommeil où vivent les plantes les plus merveilleuses et les fleurs les plus parfumées et que les premiers palmiers ébouriffent dans une immobilité métallique leurs longues ou larges feuilles au sommet d’un curieux emboîtement d’écailles géantes, Menton connaît dans l’année 1870 une période d’attente et d’incertitude jusqu'a ce qu'un citoyen de la perfide albion ne décide de s'y installer.
C’est une belle propriété que découvre en 1922 Sir Percy Radcliffe, Général de l’armée britannique, époux de Rahmeh Théodore Swinburn, une indienne. Au soir d’une carrière au service de l’Empire, Sir Radcliffe décide de faire une halte sous ce ciel lumineux dans cet amphithéâtre naturel où se sont déjà installés de luxueuses résidences, d’orgueilleux palaces et où poussent les plantes les plus rares. C’est sans doute lui qui introduira les premières plantes exotiques du jardin de Val Rahmeh.
La dernière propriétaire, riche Anglaise capricieuse et excentrique, mais aimant les fleurs jusqu’à la passion, accentuera l’aimable confusion du jardin en occupant tous les espaces encore libres. May Campbell fera de son jardin un lieu magique plein d’odeurs et de couleurs.
En 1966, le Ministère de l’Education Nationale se porte acquéreur et la propriété est affectée au Muséum National d’Histoire Naturelle qui la transforme en jardin botanique exotique. Près de 1500 taxons cohabitent dans ce petit domaine dont l’aménagement comme le choix de ses composants doivent répondre d’abord à des critères esthétiques.
Comme tous les jardins Val Rahmeh a cherché l’excellence dans quelques collections. Les fruitiers tropicaux et subtropicaux, les Arécacées et les Solanacées constituent la force et la fierté du jardin.
Entourée de végétaux aux formes, aux couleurs et aux fragrances exceptionnelles, agaves géantes, Syagrus romanzoffiane, cordylines vertes et rouges, daturas, Beaumontia grandiflora, bougainvillier rouge, Citrus, kumquats, Thumbergia grandiflora bleu, Caryota urens, la villa dans son écrin végétal apparaît comme un des derniers témoins des grandes heures du mentonnais et doit rester avant tout un lieu de splendeur.
Derrière la maison, l’oliveraie résiduelle, tend à prendre de plus en plus en couleur méditerranéenne avec l’introduction de plantes de Californie, du Chili et d’Australie ce qui n’exclut ni le Trithrinax camprestris de la Pampa ni le Ficus religiosa de l’Inde.
Dès la fin du printemps et durant l’été, le jardin d’eau évoque un riche diadème qui mêle topaze, rubis et lapis-lazuli aux verts de la malachite et du jade. Lotus, nymphéas, Victoria regia sont pures manifestations de la beauté, comme de la fragilité.
Mémoire de pierres et de fleurs, Val Rahmeh est aussi un ilôt de fraîcheur et de silence. Entouré de plantes étranges venues d’aires géographiques lointaines le visiteur fasciné éprouve un sentiment troublant. Transporté dans un univers parallèle, il succombe à la magie du lieu et au charme des Tropiques réinventés. Le grand voyage immobile commence.
Derrière un lourd portail surmonté d’un fronton mouluré rectangulaire sur lequel se détachent les portraits en céramique de Balzac et de Dickens entourant celui de Cervantes, barré d’un long bandeau reposant sur six écussons de fruits et de roses, se cache un des jardins les plus originaux de Menton, peut-être aussi l’un des plus rares, création étrange et délirante d’un personnage extravagant.
En 1921, Vicente Blasco Ibañez, séduit par Menton, décide de s’installer dans le quartier de Garavan. Vicente Vicente Blasco Ibañez a créé en ce lieu une agora ou lui-même et ses invités se promènent, s’assoient pour prolonger la discussion. La conception du banc semble répondre à un souci d’amplifier la voix.
Ce jardin est conçu pour lire ou simplement se pénétrer du charme de ces lieux embaumés par les parfums de roses et des fleurs d’oranger. Le bruissement des fontaines incite au repos et au retour sur soi, un art de vivre méditerranéen. Blasco est l’auteur des 4 cavaliers de l’apocalypse, d’arènes sanglantes et de nombreux romans. Il écrivit ici même Mare Nostrum. Plusieurs films et les dernières oeuvres de sa vie.
Continuons notre visite des jardins de Menton vers un lieu exceptionnel. Lawrence Johnston, américain, citoyen britannique et français de cœur a choisi de faire sa demeure et de créer un jardin où il pourrait installer les plantes les plus rares qu’il ramènerait du bout du monde.
Lawrence Johnston qui a toujours porté une grande attention à la nature et plus spécialement aux plantes et à leur culture, découvre la riche flore de l’Afrique du Sud, pendant la guerre des Boers à laquelle il participe comme marin de sa majesté britannique. Après la première guerre mondiale au cours de laquelle il est blessé. Il cherche donc une terre d’accueil au climat plus clément que celui de l’Angleterre.
Il s’installera à Menton le paradis retrouvé d'Adam et Eve. On découvre de magnifiques essences qui font l’originalité et la qualité de ce jardin : le chêne tropical de l’Himalaya dont la feuille n’a rien d’une feuille de chêne, les deux immenses Podocarpus aux fines feuilles en faucille et à l’ombre épaisse, les deux Washingtonia filifera, le grand Magnolia delavayi du Yunnan et enfin l’exceptionnelle Nolina du Mexique.
Pénétrant dans ce lieu intemporel, coupé des rumeurs de la ville, les fragrances qui s’exhalent du jardin, le chant des oiseaux, la majesté des grands végétaux, viennent réveiller nos sens. Couronnant le jardin aménagé, la bastide ocre a conservé tout son charme. La demeure s’ouvre sur le belvédère circulaire et son toit de glycine et la cour du mandarinier avec sa calade. Ces lieux gardent encore le souvenir des réceptions fastueuses qu’y donnait Johnston.
DIAPORAMA DES JARDINS