La fête de la châtaigne à Cagnes sur mer est en fait la rencontre des gens de la montagne avec ceux de la mer, pour une journée découverte des cultures tellement contrastées, mais harmonieuses qui se croisent, se rejoignent et se mêlent parfois dans le département des Alpes Maritimes.
Lors de cette réjouissance, le comité des fêtes de Cagnes sur mer offre et distribue gratuitement les cornets de châtaignes chaudes (en une journée 500 kilos de châtaignes seront passées sur le grill et 400 litres de vin chaud) sans oublier l'indispensable vin chaud, même si en ce jour de Samedi 17 Novembre, on dépassait allégrement les vingt degrés. Cette année pas de menu sous le chapiteau, car les 2000 places de celui ci étant devenues trop petites pour accueillir les milliers de réservations, la municipalité à décider d'offrir en self service la daube et sa polenta pour tous, au prix de deux euros.
Une excellente initiative qui comblera des milliers de visiteurs venus des quatre coins de l'hexagone pour un mois de novembre printanier sur la Cote d'Azur au grand plaisir des touristes. Mais nous parlerons de la polenta plus tard, car le thème principal de cette fête est la châtaigne et les producteurs d'Isola sont descendus de leur montagne pour nous la faire déguster sous toutes ses formes (bières, confitures, farines, apéritifs etc.)
La châtaigne est une culture millénaire venue d'Orient. Les Isoliens la doivent aux moines bénédictins de l'abbaye de Saint Dalmas de Pedona qui au XIème siècle, en firent un élément de l'économie locale. Le châtaignier était une ressource alimentaire de base, puisque son fruit féculent, lui avait valu le nom "d'arbres à pain". Le châtaignier fut introduit dans les vallées du comté de Nice par les génois à la Renaissance et connut son apogée au XIXème siècle en permettant aux populations montagnardes un apport financier non négligeable ce qui les aidait à vivre pendant la longue période hivernale.
Un peu d'histoire: la culture de la châtaigne est née cinq siècles avant J.C dans le Caucase, plus précisément en Arménie, son nom vient d'un port de la mer noire Kastan d'où partaient les «noix lisses« son premier nom. Les Grecs l'ont baptisée Kastanier, les Romains qui ont répandu sa culture dans tous leurs empires l'ont nommée Castanea Sativa. Dans la vallée de la Tinée, les plus vieux châtaigniers que nous avons pu observer ont environ 4 a 500 ans, ce qui situe le début de la castanéiculture au XVI ème siècle.
Mais l'âge d'or de la culture de la châtaigne est sans contestation la deuxième partie du XIX ème et la première du XXe siècle, les dates des granges construites l'attestent, les villages étaient très peuplés. La châtaigne avait un rôle nourricier, les gorges de la Mescla n'étant pas ouvertes, il fallait 3 jours pour rejoindre Nice par des chemins muletiers et par la fameuse route du sel qui deviendra plus tard la Real Strada (la route imperiale).
Avec l'ouverture des gorges et l'arrivée du tram à Saint Sauveur sur Tinée, les échanges s'intensifient et la châtaigne devient un facteur économique primordial, en effet l'argent de sa vente permet aux Isoliens d'acheter des biens qui améliorent leur quotidien (chaussures, meubles, divers outils agricoles et ménager etc...).
Bien que l’on trouve des châtaigniers sur presque toutes les communes de la vallée, les communes castanéicoles sont situées sur la haute et moyenne Tinée avec St Etienne de Tinée, Valdeblore, Saint Sauveur, Roure, Rimplas et surtout Isola, qui possède les plus grandes surfaces. Au total les châtaigneraies représentent encore plus de cinq cent hectares sur ces 6 communes.
Vendue dans tout le comté de Nice, la châtaigne d'Isola était aussi une ressource non négligeable de l'économie locale: alimentation humaine et animale, outillage, chauffage, etc... Au XIXème siècle, avec la diversification de l'alimentation et l'exode rural, commence le déclin de la châtaigneraie, accentuée au XXème siècle par diverses maladies.
Depuis quelques années, on assiste à la relance de cette culture, avec la réhabilitation de la châtaigneraie, et divers projets dont la création d'un atelier de transformation (fabrication de crème de marrons, biscuits ...), avec les associations locales, les collectivités locales et la chambre d'agriculture.
Chaque automne, on procède au même rituel; on foule les bogues, ramasse les fruits à la main. Pas de mécanisation possible sur les terrains en pente de notre département, mais à chaque fois, le plaisir de la récolte reste intact. Et parce que l'union fait la force, dès 2004, les propriétaires ont constitué une association, l'AFA, l'Association Foncière Agricole de la châtaigneraie du Pays de la Tinée. Prés de cent tonnes de fruits ont été récolté cette saison et un savoir faire inégalé.
Par contre le grand succès de la fête de la châtaigne de Cagnes sur Mer qui a encore battu un record de participation (30000 personnes se sont pressées sous un soleil printanier) reste la démonstration des polentiers d'isola devant leurs chaudrons géants de polenta fumante...
La polenta est une spécialité à base de semoule de maïs, céréale qui lui confère sa magnifique couleur jaune et sa texture granuleuse. Selon les villages du haut pays nissart et les goûts de chacun, ce plat populaire, qui a nourri des générations de paysans de l’arrière-pays niçois, peut se préparer de différentes façons et avoir une consistance plus ou moins épaisse.
De manière générale, la polenta sert d’accompagnement aux viandes en sauce, ou à la "doba alla nissarda", mais peut tenir aussi le rôle principal dans un repas, nappée de sauce tomate et rehaussée de fromage râpé. Elle peut se présenter comme une bouillie (cuite à l’eau salée, au bouillon ou au lait), ou sous forme de galettes rissolées à la poêle.
Originaire du nord de l’Italie, la polente, ou « polenta », est également un aliment de base des montagnes du Comté de Nice qui s'intègre culturellement dans la région Piémontaise. C'est bien simple, je ne pourrai jamais habiter un pays ou l'on ne trouvera pas de la semoule de mais pour manger une délicieuse polenta nappée de sauce tomate et d'un peu de parmesan ....
Enfin parmi les nombreuses animations de la journée, les spectaculaires démonstrations de Gilles Giguet et Roger Gehin champion de France au concours de bûcherons qui participaient à des épreuves de « coupe de bois sportive. Il s’agit d’un véritable sport de haut niveau, qui demande beaucoup d’entraînement. Par exemple, pour scier une bille de bois de 44 centimètres de diamètre au passe-partout (cette scie de 1,80 mètre de long qui se manie en général à deux), Gilles et ses collègues compétiteurs ne mettent guère plus de douze secondes lorsqu’ils sont seuls, ou six secondes à deux !
Hormis le passe-partout, les compétitions de coupe de bois sportive comportent aussi des épreuves à la hache consistant à couper des billes de bois horizontales ou verticales. Sans oublier le toujours impressionnant springboard : les concurrents font des entailles à la hache dans le tronc pour y installer leur planche de bois "le springboard" sur laquelle ils montent afin d’aller couper le sommet de l’arbre.
Une épreuve à la tronçonneuse prototype complète le tableau. « Il s’agit d’un engin équipé d’un moteur de type motoneige, qui fait 325 à 350 centimètres cubes, contre 70 à 90 pour une tronçonneuse standard ». Ces épreuves dites de Timber Sport (la discipline a vu le jour aux Etats-Unis, « timber » signifiant bûcheron en anglais) n’ont plus grand-chose à voir avec les traditionnels concours de bûcherons. « La coupe de bois sportive, c’est 60 % de technique et 40 % de physique. Et les concurrents proviennent d’horizons professionnels divers ».
Nos deux français sont les nouveaux champions du monde et tenez vous bien, devant les Américains, les Canadiens et les Norvégiens ! Pour l'épreuve de Cagnes sur Mer, l'équipe tricolore était opposée aux Italiens et bien sur nos amis transalpins n'ont pas pu tenir la distance.
DIAPORAMA DE LA FETE