Visible depuis l'autoroute il se dresse, village fantômatique, sur un piton rocheux dominant les cultures de fleurs en serre auxquelles ce territoire est désormais consacré comme beaucoup d'autres dans la zone et qui a donné son nom à toute la région "Riviera dei Fiori".
Situé sur les collines qui couronnent les vallées d'Argentina, Bussana est distant de six kilomètres de San Remo, de ses Casinos, de ses Palaces et de ses villas de milliardaires. Le 23 février 1887 le village est frappé par le terrible séisme de Ligure, d'une intensité maximale de 10 à l'épicentre (8/9 à Bussana), qui a provoqué la mort de 53 personnes et a fait 27 blessés.
Rien n'était plus gai et plus gracieux que ce paradis de vignobles, d'orangers et de violettes. Qui aurait cru, quelques instants auparavant, alors que le jour se levait, que tout allait être ravagé. La secousse a été d'une violence inouïe, détruisant presque entièrement le village. Mais le nombre de victimes aurait pu être encore supérieur, les habitants ont échappé de peu au même scénario qu'à Baiardo qui paya le plus lourd tribut humain à la nature déchainée.
Aujourd'hui, Bussana Vecchia est un village qui se visite, (on peut voir encore les stigmates de ce séisme sur les constructions) et cela grâce à une poigné d'artistes venus s'installer dès 1963. Pierre après pierre, ils ont littéralement ressuscité les ruines grâce à l'imagination, la persévérance, l'obstination, et le talent de cette communauté de hippies.
Si le village retrouva la vie, il le dut à des artistes idéalistes qui y créèrent une communauté utopiste sans propriété privée où tout n'était que partage, création pour la beauté du geste... Le village est dépourvu d'électricité et d'installations sanitaires mais la nouvelle communauté s'agrandit et s'élève à 20 / 30 personnes vers 1968, pour la plupart d'entre elles, des artistes hippies venus de toute l'Europe (Italiens, Autrichiens, Anglais, Français, Danois, Allemands et Suédois).
Les tensions entre les anciens habitants et la police s'intensifièrent jusqu'a ce qu'une éviction fut ordonnée. Quand les forces de police arrivèrent sur les lieux, ils furent face aux marginaux, placés derrière les barricades, refusant de quitter le village. La police décida d'éviter l'affrontement.
Bussana Vecchia longtemps fantôme et insolite, qu'on peut croire complètement délaissé lorsqu'on l'aperçoit de loin depuis l'autoroute, accueille la bagatelle de 50000 visiteurs par an. Les Artistes peintres ou Sculpteurs de Bussana ont fait de ce village un joyau sur la Méditerranée. Ils ont édifié des arcs maçonnés, (appelés aussi arcs de contraste ou encore arcs de confortement), au dessus des ruelles.
Chiara Gianinazzi remet une brebis à Soso
Ces éléments ne sont pas construits n'importe où, ils vont de point dur à point dur, c'est à dire de plancher à plancher, ou de mur de refend à mur de refend. Cette technique très répandue en Ligurie et dans les Alpes-Maritimes, offre une relative souplesse et permet une meilleure transmission des contraintes horizontales au niveau des planchers. Grâce à ces liaisons, les immeubles ne se comportent plus comme des éléments isolés mais comme un ensemble de blocs dynamiques.
Partout dans les ruelles, les caves, les greniers vous trouverez un artiste exposant ses œuvres. Mais Bussana est aussi un magnifique jardin tropical, des murs et des voutes ressortent une multitude de plantes grasses, cactus, cycas, yuccas, géraniums au milieu des palmiers et des bananiers. Loin du tumulte de St Paul de Vence ce village respire la Dolce Vita à l'italienne... la vraie.
Ici comme je vous l'ai dit, pas de titre de propriété et c'est le système D de ses habitants qui ont fait le reste. L'électricité ? Pas de problème, on va se repiquer sur le dernier poteau qui se trouve à la sortie du village. Pour l'eau pas de soucis, on installe des cuves de récupération d'eau de pluie sur les toits et les terrasses. L'aménagement après la reconstruction des ruines ? Que de la récupération... Vous avez même l'impression que fourneaux, matériel de cuisine, mobilier viennent tout droit d'un musée d'antan.
L'accueil des habitants ? Un panneau aux couleurs du "Flower Power" vous invite à boire l'apéro ... Une gentille jeune femme avec sa brebis, nous explique qu'ici, on peut manger et boire gratuitement, que tout est offert ! Si l'on veut laisser quelque chose dans l'urne, c'est à l'appréciation et sans aucune obligation. On se retrouve parmi des Russes, des Hollandais, des Italiens, nomades ou sédentaires qui sont la à l'année ou bien pour quelques mois.
Le bouche à oreille de ces communautés marginales marche dans toute l'Europe et chacun peut venir y loger le temps qu'il voudra en ayant du respect pour le lieu qui l'accueille. Vous vous souvenez du film de Christian Clavier "les babas cool", et bien ici, c'est pareil ! Nos hôtes nous offrent la bière et voire plus si nous voulons (nous remarquons d'étranges plantes qui poussent à proximité et une odeur qui ne doit pas être de l'eucalyptus).
On décide tout de même de manger au restaurant panoramique de l'entrée du village. Ce sera plus sur. Même si nous devons payer l'adition, on ne risque pas de manger du "Haschich Parmentier". Toujours est-il qu'ils sont véritablement sympathiques et la petite bergère à des arguments pour vous faire déposer les valises.
Ensuite partez à la découverte du village, c'est un enchevêtrement de vieilles ruelles, de galeries souterraines, de ruines ou la végétation c'est imposée à la manière du temple d'Angkor au Cambodge. Une excitation particulière d'aventurier et d'archéologue vous poussera à fouiner dans les recoins sombres et mystérieux...
LE TERRIBLE CAUCHEMAR DES HABITANTS DE BUSSANA
*A 6 heures 21 du matin, une secousse de 20 secondes d'une extrême violence causa destructions et morts immédiates dans tout le village. Une grande partie de la religieuse population se trouvait dans l'église où elle suivait la messe. L'effondrement du mur en face de la façade de l'église avisa la congrégation du danger et beaucoup cherchèrent refuge dans les chapelles latérales. Mais une autre réplique fit s'écrouler le lourd toit en voûte de l'église, tuant un certain nombre de personnes.
Dans les petites ruelles avoisinantes, c'était un spectacle de désolation : pans de murs branlants prêts à s'effondrer, poutres, objets divers de la vie quotidienne et familière réduits à de pitoyables et dangereux vestiges après la tempête. Le sauvetage se révéla difficile et très périlleux étant donné l'état précaire des murs tenant par miracle et menaçant de s'écrouler à tout instant et la fréquence des répliques.
La seconde fit s'effondrer des ruines, ensevelissant des sauveteurs. La population fut obligée par l'armée de quitter le village, sans pouvoir rechercher les éventuels blessés sous les gravats. Une trentaine de soldats se portèrent au secours de la malheureuse population. Le Lieutenant Mattei sauva deux enfants ensevelis sous les décombres et appelant leur mère, morte à leur côté.
A la fin du XIXe siècle, au petit matin du mercredi 23 février 1887, en Ligurie et dans les Alpes-Maritimes, s’est produit l’un des tremblements de terre le plus catastrophique qu’ait connu le sud méridional, faisant 635 morts et 555 blessés sur la Riviera Ligure.
DIAPORAMA DE LA BALADE