A Pékin, le citron de Menton découvre une culture, des traditions et des monuments époustouflants. Mais bientôt la venue de cet hôte protégé s’ébruite comme une trainée de poudre dans la cité impériale.
L’agrume mentonnais est alors pourchassé par une horde de bandits. Le voyage initiatique devient une fuite effrénée. Les agrumes méditerranéens se lancent alors dans le plus haletant des périples au pays du céleste empire. Echappant à leurs malfaiteurs éreintés et exténués, les fugitifs donnent finalement du sens à leur aventure.
Comme le héros de Jules Verne, il aura fallu connaitre la peur et le malheur pour apprécier pleinement le bonheur. Et pour la circonstance, il rencontreront leur cousin Marco Polo qui viendra à leur secours…
Depuis quelques années déjà, l’engouement des médias asiatiques pour le fruit du soleil ne se dément pas. Pour preuve, des chaînes de télévision, mais aussi des magazines et des sites Internet de Chine, de Hong Kong, du Japon ou encore de Corée font le déplacement pour couvrir les fêtes de l’hiver sur la Cote d’Azur. De même de grandes marques ont utilisé les agrumes mentonnais comme décor de fond pour promouvoir leurs produits, telle une nouvelle caméra 3D.
Enfin, l’artiste japonais Yusuke Kamiji est venu pendant la Fête du Citron pour y tourner le clip de sa chanson « Remon » qui signifie « citron » en français. Jouissant d’une belle image auprès des pays asiatiques, connue déjà pour sa Fête du Citron, événement unique au monde, la ville a anticipé cette tendance forte et a cherché dès cette année à développer sa visibilité sur la toile.
L’Office de Tourisme s’est ainsi doté d’un site Internet en mandarin, mais pas seulement. Avec l’aide précieuse d’un collaborateur originaire de Chine, Menton et la Fête du Citron sont désormais présentes sur les réseaux sociaux chinois, tels que Weibo, l’équivalent de Facebook ou encore Youku. com, site de partage de vidéos.
Si le citron est à lui seul le symbole de Menton, c’est parce que son histoire est intimement liée à celle de la commune. L’agrumiculture mentonnaise amorce ainsi son développement dès le 15e siècle. Mais c’est véritablement 200 ans plus tard qu’elle va connaître son plein essor, avec la promulgation de textes législatifs par les Princes de Monaco qui la dirigent.
En 1671, le Prince Louis 1er institue le « Magistrat des Citrons ». En 1683, une ordonnance règle la culture et la vente du citron. Suit en 1701 une ordonnance créant le « Magistrat de Santé » qui a pour mission de veiller à l’état sanitaire des exportations du fruit d’or. Le traitement des citrons destinés à l’exportation fait l’objet d’une réglementation plus rigoureuse en 1733.
À la faveur d’une activité commerciale florissante, d’un contexte favorable aux petits exploitants, de textes encadrant la production et la qualité du fruit, l’agrumiculture va connaître une période faste pendant un siècle, atteignant son apogée dans les années 1820 à 1840. On retrouve alors sur les étals des marchés le citron de Menton à Hambourg, à Amsterdam, Varsovie, Saint-Pétersbourg et même aux Etats-Unis.
Dès le milieu du 19e siècle, l’agrumiculture doit cependant faire face à une multitude de problèmes précipitant son déclin. Au niveau local, le gel va décimer les plantations à deux reprises. De plus, les techniques de culture n’ont guère évolué et restent les mêmes qu’au Moyen-Age. Aux méthodes archaïques s’ajoute l’absence d’un réseau d’irrigation performant, entraînant de grandes fluctuations dans les récoltes.
Le relief du pays mentonnais ne favorise pas la création de grandes exploitations. Le morcellement extrême des surfaces cultivables et le nombre de chemins communaux que l’administration refuse d’entretenir à partir de 1861 (annexion à la France par Napoleon III), vont condamner une grande partie des exploitations.
Menton ne dispose pas d’un véritable port de commerce permettant la venue de grandes unités comme à Nice ou à Gênes. Au fil du temps, les armateurs vont se tourner vers l’Italie et l’Espagne. L’agrumiculture doit faire face aussi à l’essor du tourisme qui provoque dès le milieu du 19e siècle une spéculation foncière sans précédent.
Au fur et à mesure, les exploitations disparaissent pour laisser place à l’édification de grands hôtels qui font encore aujourd’hui le charme de la cité. La signature de deux traités économiques abaissant les droits de douane à la fin du 19e siècle et la Première guerre mondiale, qui voit disparaître toute une jeunesse active, vont nuire davantage encore à la culture du citron.
Enfin, le terrible gel de 1956 va mettre un terme à la culture que nos ancêtres Mentonnais avaient organisée et développée pendant cinq siècles. Trente ans plus tard, le citron de Menton entame son renouveau. Aujourd’hui, il est de nouveau reconnu dans le monde entier, pour ses qualités gustatives et olfactives, et très recherché par les chefs étoilés.
De ce fait, la production est en phase de relance et compte aujourd’hui une quinzaine d’agrumiculteurs. La Ville de Menton, avec ses partenaires encouragent son développement: plus de 5 000 arbres ont ainsi été plantés depuis les années 90. Cette renaissance devrait s’accompagner bientôt d’une reconnaissance: l’obtention prochaine d’une Indication Géographique Protégée (IGP) sur la base des atouts et des spécificités de l’agrume exceptionnel.
Le Citron de Menton se caractérise également par des rameaux très fructifères, capables de porter une quinzaine de fruits quand la plupart des citronniers en compte moins de cinq par rameau. Les recherches menées avec l’I.N.R.A. révèlent que le citron du terroir mentonnais est riche en acides et en essences. Sa peau a une forte teneur en huile essentielle. Parole d’experts !
Comme je vous l’ai dit dans le résumé de mon premier article, cette exposition n’est qu’un infime parti des festivités de la la fête du citron de Menton. Le soir par exemple tout s’illumine dans les jardins Bioves. En Chine, à la première pleine lune qui suit le nouvel an, on fête la lumière céleste à la lueur des lanternes.
A Menton aussi, on célèbre la rencontre des décors d’agrumes et de l’éclat nocturne qui les magnifie. Jeux de lumières, ombres chinoises et lueurs créent une atmosphère fantastique ou le festif se confond à l’inattendu.
La nuit d’étranges créatures habitent les compositions acidulées et surgissent de nulle part, provoquant surprises et frissons, rires et émotions. La lumière en offrande au ciel étoilé est source de santé et de prospérité dans les croyances chinoises et seul Menton est capable de fournir cela en France….
Sur les 140 tonnes de citrons et d'oranges utilisées, 110 tonnes sont ensuite revendu au public pour la somme de 50cts le kilo. Le reste est racheté par les usines de parfumerie grassoises.
DIAPORAMA DE MENTON